mercredi 29 juillet 2009

[J'y étais !] : Marnie Stern + Tartufi + Trash Kit @ The Luminaire, Londres, 23 Juillet

Sans le savoir avant d’y arriver, j’allais passer une soirée spéciale « math girls ».C'est-à-dire une série de concerts punchy et concentrées autour de boucles de guitares hypnotiques, joués par des filles qui ont assurément beaucoup écouté Battles ou Don Caballero.

Les trois londoniennes de Trash Kit évoquent inévitablement une version math des Slits, avec cette façon de tordre un genre vers quelque chose de tribal et de joyeux. Elles assurent toutes techniquement, et l’énergie ne faiblit pas. Il ne leur reste plus qu’à composer de vraies chansons, car on n’a eu le droit qu’à des fragments d’idées d’1mn 30 maximum. Myspace. 3/5

Tartufi a été la grande surprise de la soirée. Ils sont deux sur scène, mais il suffit de fermer un instant les yeux pour avoir l’impression d’écouter jouer 10 musiciens. Brian Gorman (batterie, claviers, xylophone) et Lynne Angel (chant, guitare, basse, claviers) sont multi-instrumentistes et passent sans cesse d’un instrument à l’autre au sein d’un même morceau, en ayant recours à l’enregistrement de boucles en directs. Leur musique est donc basée sur des superpositions progressives de couches, permettant aux morceaux aux structures complexes de se développer. Mais attention, il n’est pas question d’une musique à crescendo pompeuse et simpliste à la Explosions In The Sky, mais plutôt d’un bordel magistralement ordonné, avec des changements constant de boucles maths et de rythmes. Les morceaux se sont enchainés sans temps morts (si bien que j’avais l’impression de voir se construire un long mouvement de 30 minutes). Leur deuxième album Nests Of Waves And Wire est sorti en mai dernier. Super découverte, un groupe très aventureux à suivre ! Myspace. 4/5

Vint ensuite le show tant attendu de la guitar heroin Marnie Stern : concert impeccable, on y retrouve la même dextérité et folie que sur disque. Mais le tout manquait monstrueusement de générosité. Ce n’est pas qu’elle n’arrive pas à restituer l’énérgie phénoménale qu’il y a sur son dernier album, mais elle a simplement du mal à la surpasser. L’absence de Zach Hill sur scène se fait peut être aussi inconsciemment ressentir. Il y a eu aussi un gros problème quand à la durée de sa prestation. Je sais bien qu’elle succédait à déjà au moins 1h30 de musique avec les deux groupes précédents, mais on est tous venu au départ pour elle, et elle ne reste que 45 minutes. Elle nous a même fait attendre 5 minutes à l’issu de son show, pour finalement ne pas revenir. Pour combler le tout, la bassiste, beaucoup trop bavarde, perdait son temps à coups d’interludes parlées ennuyeuses en mettant apparemment Marnie Stern mal à l’aise avec ses histoires. J’en retiens quand même de nombreux moments intenses, et elle reste la reine du rock géométrique…sur disque. Myspace. 2,5/5

François.

lundi 27 juillet 2009

[Tourne Disque] : The Fiery Furnaces - I'm Going Away

Label : Thrill Jockey
Sortie : 21 Juillet 2009
4/5











J'ai longtemps été un peu éloigné des
Fiery Furnaces parce qu'ils étaient trop prog pour moi. Ils faisaient des albums réputés brillants (François vous en parlerait mieux que moi), mais trop longs, trop complexes. Je ne suis pas assez intelligent pour ça, ni assez patient, et je ne suis pas le seul. Voilà pourquoi après avoir bien aimé leur "EP" qui n'en était pas un ("Single Again" reste un sacré tube!), j'ai totalement décroché. Mais nous voilà 4 ans plus tard, et après une pléthore d'albums qui m'ont fait peur (comme le double-album live interminable de l'année dernière, Remember - si c'est pas la preuve prog ultime ça!), I'm Going Away arrive comme un album plus "facile" de la part du duo, plus accessible. Et c'est très bien comme ça.


Voilà un album "à l'ancienne", c'est-à-dire un vrai album, une collection de chansons qui forment un tout cohérent au milieu duquel tout les morceaux sont parfaitement à leur place. Voilà un album qu'on écoute pas pour 4 très bons moments qu'on passe en boucle, mais pour 12 compositions réussies qui se suivent avec une fluidité trop rare de nos jours. Ça sonne comme un truisme d'avoir à rappeler ce qu'est un vrai album de pop music (car
I'm Going Away est définitivement pop, et c'est là sa force) un album pop d'après le modèle en vigueur depuis, disons, la fin des 60's, mais bon sang, pour une fois qu'un groupe semble l'avoir pigé, on est en droit de se réjouir et le défendre face à des armées de blasés.

La fin des 60's d'ailleurs, puisqu'on en parle, elle est présente dans cet album, et c'est tout à son honneur. Ça et les ambiances 70's offrent à cet album un certain charme rétro qui poussera les cyniques et/ou les rockeurs à qualifier cet album de
Soft Rock ou je ne sais quoi. Il y a effectivement de ça quand on entend les guitares électriques qui harmonisent dans l'aigu ou sont noyés dans une wah-wah terrible (je pense à "Keep Me in Dark"), certains solos outranciers, certains breaks de batterie à coup de grosses descentes sur les toms, ou le gros piano qui joue fort. Pourtant, il serait de bien mauvais foi celui qui oserait dire que cet album est passéiste, tourné vers une période. Je défie quelqu'un de me dire "ah oui, ça me rappelle tel groupe". Parce que les Fiery Furnaces sonnent comme personne. Ils ont ce penchant tordu et arty, inhérent à tout leur discographie, qui sublime ici le coté bigrement efficace des compositions sans perdre de son pouvoir d'hypnose. Je ne vous parle même pas d'idées qu'on entend directement, comme du fait d'accélérer le tempo pour passer de la ballade en un final gros rock sur "Drive to Dallas", même si ça en fait partie. Non, tout le reste, tout ce qui est caché derrière, tout ce qui est le suc même du groupe. Les arrangements curieux. Les structures bizarres. Les mélodies un peu inattendues. On pourrait croire que tout cela serait dénaturé dans un contexte plus pop-rock ; bien au contraire.

Ce qui est génial, c'est que
I'm Going Away montre à quel point ce duo est complémentaire. D'un coté, y'a le frère, Matthew, qui compose des morceaux prenants et riches sans avoir l'air de faire d'efforts (un album par an depuis 2003 tout de même!), mais il ne serait rien sans sa soeur - qui ne serait rien sans lui -, Eleanor, qui surplombe l'album avec sa voix absolument géniale et unique, que ce soit quand elle éructe des phrases interminables sur un "Cut The Cake", ou quand elle se révèle chanteuse rock sur "Staring at the Steepel". Le résultat est un vrai plaisir à écouter. Pour vous faire danser tout seul, y a des tubes impossibles comme le parfait morceau-titre (à la basse qui groove), ou le miraculeux "Charmaine Champagne" (auquel répond "Cups & Punches" qui a les mêmes paroles!) qui swingue plus que tout avec ses syncopes et son petit riff de piano, à coté desquels Eleanor lache des "pa pa pa" avec classe. Et puis quand il s'agit d'être plus posé, écoutez un "The End is Near" et vous verrez bien tout le talent mélodique de cet album. Parce que c'est surtout ça sa grande force : les mélodies. Ultimes très souvent. "Take Me Rounds" et son refrain qui rend heureux. La mélodie au piano de "Even In The Rain". C'est pour ça qu'il passe en boucle chez moi. Il est rempli de choses géniales à écouter, de petits trucs qui donnent envie de chanter fort, de passages ultimes qui font dire à chaque morceau "hé! c'est celui-là mon préféré!". Ce sens pop ne doit jamais être détaché des Fiery Furnaces. Jamais. Et il prend tout son sens ici, dans ces morceaux qui vous font chanter tout en restant intelligents.

Le duo a fait un album de
classic rock vous dites? Non, je ne crois pas. Ils ont fait un album inclassable et irrésistible. Non mais rendez vous compte! C'est un album homogène, réussi, assez posé et rempli de mélodies d'enfer sur des refrains super chouettes! C'est vrai que dit comme ça, on dirait que je parle d'un album sorti il y a longtemps.

Emilien.



Vous trouverez la vidéo de Charmaine Champagne en dessous de ce post, dans la rubrique Télégrammes! J'ajoute que les Fiery Furnacles sont en ce moment même en train d'enregistrer deux albums de reprise de I'm Going Away, un par membre. Les deux versions revisitées en solo sortiront en Septembre! On vous en reparlera dans le Mange-Disque, évidemment.

dimanche 26 juillet 2009

[Le billboard du Mange Disque] : Les remarques les plus couramments entendues sur la musique

Les morceaux du Mange Disque suscitent de multiples réactions venant de notre entourage. Morceaux choisis de celles qui reviennent le plus souvent.

François
- "C’est un peu répétitif quand même"
- "Ça ?! De la musique ?! J’appelle ça du bruit moi"
- "Quand est ce que le chant arrive ?"
- "Oué ça va, c’est pas mal"
- "Quoi ?! Il n’y a que 5 morceaux dans l’album ? Ils ne se sont pas trop foulés hein !" (en parlant d'un disque composé de titres de 10 à 20 minutes)


Émilien
- "Ce n'est pas de la musique ça. C'est du bruit"
(variante ingénue et plus familiale : "le lecteur cd est cassé?")
- "C'est toujours la même chose cette musique, c'est répétitif"
- "Heu... c'est bizarre ton truc... t'aimes vraiment écouter ça?"
(ou "ah, t'écoutes encore un de tes trucs bizarres..." pour les gens plus habitués)
- "Ah oui, ça me rappelle un peu [un truc qui n'a rien à voir]"
(suivi forcement d'un "heu... oui.... un peu" en guise de réponse gênée)
- "C'est sympa" (verdict douloureux de l'indifférence polie)

Christopher
- "Quand est ce que ça commence ?"
- "C'est un peu long non ?"
- "Ça ne te dérange pas de baisser un peu stp ?"
- "Ça veut dire quoi harsh-zheul-prog-drone-noise-math rock ?"
- "C'est vraiment pas mal hein !"

samedi 25 juillet 2009

[Télégrammes] : Semaine du 20 au 25 Juillet

Un nouveau morceau du prochain album de Muse (The Resistance) a été dévoilé : The United States of Eurasia. Quand Muse fait ressusciter Freddie Mercury dans le Sahara, tout en pillant Chopin :

Ils s’enfoncent dans leur trip prog grandiloquent; j’aurais préféré plus de folie et moins de pillage.


La meilleure nouvelle de la semaine : Jim O’Rourke (ancien membre et producteur de Sonic Youth, musicien protéiforme, auteur de la pop la plus classique à l’expérimentale la plus chevronnée) revient enfin le 8 Septembre prochain avec un (vrai) nouvel album très attendu. The Visitor sera dans la veine de l’intemporel Bad Timing, avec un unique morceau de 38 minutes.











On retrouve la boule disco de Bad Timing en éclats et on peut ainsi s’attendre à un nouveau miracle de free folk étoilé.



Triple actualité pour Thom Yorke, pour trois inédits :
Le chanteur de Radiohead a composé un nouveau morceau studio écoutable ici, pour la compilation Ciao My Shining Star: The Songs of Mark Mulcahy, dédiée à la défunte femme de Mark Mulcahy, membre du groupe New Heaver.

Concert solo lors d’un festival : nouveau style capillaire, et accessoirement, nouvelle chanson, The Present Tense.


Il a aussi composé une chanson pour le deuxième épisode de Twilight. Le terrifiant Suck Young Blood de Hail To The Thief aurait parfaitement fait l’affaire, mais toutes les raisons sont bonnes pour une nouvelle chanson de Thom Yorke.


Pour les fans de Constellation, deux sorties enthousiasmantes par deux piliers du label montréalais :
Prince of Thruth de Carla Bozulich/Evangelista, pour le 5 Octobre













At The Cut
de Vic Chestnutt, pour le 21 Septembre








Au passage, n’oubliez pas d’écouter les trois dernières formidables parutions du label : Clues, Land of Kush et Elfin Saddle.


Nouveau clip des Fiery Furnaces : le boogie-woogie Charmaigne Champagne, tiré de leur génial dernier album, I’m Going Away. Le duo de pop expérimental démontrent qu’ils savent faire des chansons accessibles, toutes aussi passionnantes que leurs travaux les plus compliqués :



Enfin le duo Fuck Buttons, auteur du mémorable album de drone électronique planant Street Horrrsing, a dévoilé la sortie de Tarot Sport pour le 12 octobre prochain.


En bonus, une info un peu datée : un extrait du prochain album solo de Tyondai Braxton (guitares/claviers/voix de Battles) !

Cela ressemble fortement à du Battles orchestral et symphonique, ou, au choix, à une version avant-gardiste d’un générique de Tex Avery.

François.

vendredi 24 juillet 2009

[J'y étais !] : Deerhoof @ La Scala, Londres, 1er Juillet

5/5
Myspace
















J'ai vu pour la deuxième fois Deerhoof à Londres, et ils confirment ce que je pensais: ce groupe américain de pop dada excentrique est le meilleur à voir en concert. Ils répondent aux attentes les plus primaires du spectateur rock : danser en convulsions, s’amuser des chorégraphies scéniques, s’émerveiller de la complexité et de la maitrise du show. Il est rare que je sois aussi attentif à chaque détail lors d'un concert, dégustant au maximum chaque seconde passée en leur compagnie: les décharges d'énergies imprévisibles du batteur Greg Saunier (impossible en sa présence de tenir la mesure en tapant du pied), le chant délicieusement bizarre de Satomi, et le jeu hyper précis et instinctif des deux guitaristes, Ed Rodriguez et John Dieterich. A ce propos, ces deux immenses musiciens réalisent une synthèse incroyable de tous les riffs possibles et inimaginables du rock, des attaques punk agressives aux arpèges math rock en boucles. Et puis il y a cette complicité rare entre les quatre musiciens, qui transpire la sincérité.

Ce concert m'a aussi fait prendre conscience qu'ils sont avant tout de vrais performers scéniques. Il ne faut pas oublier que c'est de la pop enfantine hardcore, techniquement compliquée et progressive dans son essence (sans tous les mauvais côtés associés et bien connus), avec une énergie punk, tout en étant submergée de sursauts joyeux. Ce qui en fait une musique définitivement unique et sans nulle doute impossible à jouer correctement en reprise.

Deerhoof laisse aussi la place durant leurs shows à de purs chocs soniques, comme ce magnifique larsen collectif de plus de 2 minutes qu'ils nous ont offert, soutenu part un déluge percussif ahurissant de tous les diables. Ils ont tout compris, un concert de rock, ce n'est pas de l'interprétation, ça se vit.

François.

lundi 20 juillet 2009

[Bonus Tracks] : Ebony Bones, Revolver, La Roux, The Dead Weather

Ebony Bones - Bones Of My Bones
Pias
6 Juillet 2009
3/5



D’actrice de drama anglaise jusqu’en 2005, Ebony Thomas est devenue la diva punk Ebony Bones. Entourée d’une troupe d’huluberlus costumés comme dans un carnaval futuriste (un sioux en guise de guitariste, les deux chœurs aux cheveux teintés de bleu et de violet incarnant des sorcières africaines possédées, un mystérieux claviériste masqué au chapeau melon, et la reine submergée d’imposants colliers multicolores), elle s’est vite imposée comme une artiste inclassable dans la musique mainstream. A côté de ce parti pris visuel osé, la musique explose elle aussi quelques carcans : dynamiques dignes de Liquid Liquid (percussions afrobeat qui viennent des bas-fonds), ska foutraque (pas très loin des Slits), énergie punk et multi voix qui cavalcadent dans tous les sens. On pense aussi bien sûr aussi à M.I.A ou à Santigold, ces chanteuses à fortes personnalités artistiques, mais contrairement à ces dernières, Ebony Bones n’est pas aussi convaincante sur disque que sur scène. Bones Of My Bones accuse une sérieuse baisse de régime dans son deuxième quart (des morceaux plus radio-friendly avec des beats lourdingues presque "house") ainsi qu’un effet de redondance dans son ensemble. Maintenant que la recette est présentée sur ce premier album, on attend un vrai déploiement pour le prochain.




Revolver – Music For a While
EMI
1er Juin 2009

2/5


Le trio parisien Revolver connait bien ses classiques, et fait plus que le prouver sur son premier album. Rempli à ras bord de références pop et folk, des Beatles aux Beach Boys en passant par Simon And Garfunkel, Music For a While est un disque élégant (vocalises aériennes, mélodies délicates, superbes arrangements) et bien écrit. On pourrait saluer l’hommage de bon goût, mais Revolver n’est en fait rien de plus qu’un cover band sixties haut de gamme, qui a pour seul atout (ce n’est pas négligeable) de donner envie de réécouter les originaux (The Kinks, Montage, The Zombies).




La RouxLa Roux
Polydor
29 Juin 2009
1,5/5


Au contraire de tous ces groupes d'indie fluo qui ne font que singer les codes eighties avec vulgarité, La Roux les maitrise elle à merveille (beats sophistiqués, claviers punchy, production exemplaire), et arrive à se démarquer suffisamment grâce à son timbre de voix ample qui vaut parfois le détour. Mais même en admettant qu’on puisse apprécier ce genre de pop gluante (en termes de synth pop tubesque, ce disque pourrait bien faire figure de modèle), La Roux a le même symptôme que Music For A While de Revolver : un disque passéiste et bien fabriqué qui n’apporte absolument rien.




The Dead Weather - Horehound
Third Man
13 Juillet 2009

1/5


The Dead Weather est un projet de rêve (Jack White des White Stripes, Alison Mosshart des Kills, Jack Lawrence des Raconteurs et Alison Mosshart des Queens of the Stone Age), pour un album de hard rock grossier qui serait passé complètement inaperçu sans ses guests stars. Tout est balancé droit dans le mur avec lourdeur, seules I Cut Like a Buffalo (avec son clavier prog et les hennissements de Jack White) et l'instrumentale étrange 3 Birds parviennent à sortir du lot. Ces deux morceaux approchent un univers baroque et dark qui aurait du survoler tout l’album pour qu’il eut été un tant sois peu original.



François.

mercredi 15 juillet 2009

[Tourne Disque] : Le Klub Des 7 - La Classe de Musique

Label : Encore Music
Sortie : 25 Mai 2009
4/5











Vous attendiez quelque chose de cet album? Sérieusement? Je veux dire à part si vous étiez super fan, les autres, vous l'attendiez? En 2009, vous pensiez vraiment qu'il y avait quelque chose à espérer du "hip hop alternatif" (je cautionne pas le terme) français après des déconfitures énormes récemment, commencée en 2006 avec le douloureux 3615 TTC? En 2009, vous aviez pas déjà été complètement lassés par l'album du Klub Des Loosers ou les premiers TTC? Franchement, vous pensiez que le deuxième album du Klub des 7 allait être juste intéressant après un premier trop bordélique pour être marquant et la mort d'un des membres? Moi non. Je ne croyais pas du tout en cet album, ni en ce groupe, ni en fuzati, ni en personne pour me faire aimer à nouveau du rap français en 2009. Je les voyais mort. Quand on m'a dit "y'a un nouveau klub des 7", j'en ai d'abord eu rien à foutre : qu'attendre de types qui ont tout dit et vivent sur des recettes, des trucs, des gimmicks? Cynarure rappe vite, Fuzati est déprimé, etc. Mais finalement, La Classe de Musique se révèle être étonnement réussi et prend toutes les critiques de court en étant tout simplement d'une efficacité redoutable.

Déjà parce qu'on a vraiment l'impression d'écouter un "album", de la part d'un vrai "groupe", avec un concept sur les années de l'école primaire qui est un peu éculé, mais utilisé avec un soin tel qu'il lie les morceaux entre eux de manière assez géniale. Oui, c'est un concept album d'une certaine manière, et ça fonctionne très bien, parce que comme dans les expressions écrites à l'école, c'est plus facile quand on a un sujet défini que quand on nous dit "écrivez ce que vous voulez". La dessus, nos 7 membres (moins 1, bien qu'il apparaisse sur certains morceaux - ses camardes lui rende d'ailleurs un très sobre mais touchant hommage dans "L'Appel" qui montre que ces gens là ont aussi du coeur) exposent chacun des thématiques différentes qui leur sont propres, mais qui créent un ensemble homogène, sans qu'aucun n'écrase ni ne desserve les autres. Alors, certes, on peut avoir des petits chouchous (moi, ce serait Gerard Baste, qui est assez ultime sur certains morceaux, ou Fuzati, moins présent mais encore plus efficace qu'avant), mais tout le monde est au top, et c'est un plaisir d'entendre une suite quasi-continue de phrases tellement cools que t'as envie de les ressortir dans la vraie vie (mais c'est pas possible).

Et puis y'a les instrumentaux de Fuzati qui sont assez canons, dans une ambiance sixties très cool (on entend même la basse de lady madonna à un moment) qui sonne du tonnerre. C'est bien simple, sur certains morceaux (je pense à "En Route"), ça fait décoller le truc. Ecoutez "Boule de Cristal", c'est du pure génie, des textes de haut niveau sur des orgues/pianos parfaitement envoyés avec un refrain chanté doucement mélancolique (une ambiance qui parsème tout l'album d'ailleurs), et c'est pareil sur des morceaux comme "C'est Le Klub Des 7". Des morceaux qui ont en plus la qualité de faire intervenir tout les membres du Klub ; ce sont les oeuvres de groupe qui sont donc les plus convaincantes au final. Y'a aussi des petits interludes instrumentaux avec des samples qui sont sympatiques. Seul bémol, les passages parlés qui ont comme unique défaut de ne pas être drôle du tout - dommage que ce soit leur unique objectif ahem ahem.

Bref, voilà un album réjouissant et efficace, sans temps mort ni lacunes. Est-ce qu'il vieillira bien? Est-ce qu'on l'écoutera toujours en 2012? Il me semble que oui, mais le temps nous le dira de toute façon. Pour l'instant, voilà un très bon album de rap français qui sait à la fois être léger et parfois beaucoup plus grave derrière les blagues, et dont les membres sont presque nos potes quand on a fini l'album. Je demande pas plus.

émilien.

Extrait musical de l'album :
Le clip un peu cheap du formidable "Le Chiffre Impair".

vendredi 10 juillet 2009

[Tourne Disque] : Sunn O))) - Monoliths & Dimentions (contre chronique)

Label : Southern Lord
Sortie :18 Mai 2009
1,5/5











Longtemps, je me suis couché de bonne heure et je me suis demandé pourquoi Sunn O))) était un groupe aussi nul. C'est pas que j'aime pas le drone, mais j'ai toujours trouvé leurs longues grosses notes graves qui bourdonnent aléatoirement un peu chiantes, et c'est pas faute d'avoir essayé plusieurs albums. C'était presque une blague pour moi ce groupe, à chaque fois que j'entendais un son régulier grave dans la rue, je disais "han, quelqu'un écoute du Sunn O)))" (je riais seul). Alors quand on a présenté Monoliths & Dimensions (ce titre...) comme étant l'album "orchestral" de Sunn O)))), avec des critiques enthousiates dans Wire, j'ai eu un genre d'espoir : un album de drone qui mêlerait grosses guitares et orchestrations de l'enfer? Mais bien sur! Ce sera pas ce qu'on écouterait avant d'aller se coucher, mais il y avait là un créneau génial très peu exploité qui lierait dans un même ensemble le doom et la musique contemporaine. J'y croyais vraiment.

Et j'y ai cru encore pendant 5 minutes à la première écoute. 5 minutes et 38 secondes pour être précis. Parce que Aghartha, morceau assez classique dans l'absolu, commençait bien, c'était assez prenant, c'était dense et ample, il se passait quelque chose. Et puis patatras. Chassez le naturel, il revient au galop. Vous imaginiez Sunn O)))) parti dans des territoires modernes et originaux? Et les revoilà qui se remettent à faire les cons, les voilà encore repartis à se prendre pour des putains de vikings de l'enfer, et voilà une grosse voix grave qui fait peur qui vient tout simplement détruire le morceau, le rendre passablement affreux, façon gros métal qui tache. Je venais juste de rentrer dans le morceau, et voilà que ces cons en capes se croient en live à Stonehedge et se mettent à faire "Beuuuuu" en infra-grave, se raclant la gorge pour faire peur et racontant une histoire qui semble assez longue mais que j'ai pas eu envie de comprendre, parce que les audiobooks doom metal, très peu pour moi. Sérieusement. Dites moi Sunn O)))), pourquoi vous avez fait ça hein? Pourquoi vous avez fait ça sur 3 des 4 morceaux de l'album le coup des grosses voix graves qui vous font remonter les glaires? Vous allez me dire "oui, mais c'est pas ton background le metal, tu peux pas comprendre, pour nous autre qui avions des sweet shirt noirs à 18 ans en s'écoutant des trucs bourrins, ça passe très bien cette voix". Soit. Mais il faudrait donc forcement avoir eu une adolescence de merde pour aimer cet album?

Non mais plus sérieusement, Aghartha, à la fin, avec les violons dégueulasses, les bruits de bois qui craque, ça, c'est excellent, mais y'a cet espèce de faux-druide qui me vibre dans le tympan, et qui fout tout en l'air. Même un solo de kazoo, ça aurait été mieux. Et sur Big Church, avec ses choeurs féminins un peu kitschs mais cools, c'est pareil, revoilà les barbares qui braillent et qui foutent en l'air un morceau pourtant bien parti (même si le coup des sons de cloches, c'était peut être un peu too much). Et je vous parle même pas de Hunting & Gathering (Cydonia), morceau quasiment schizophrène, où se côtoient d'un coté l'horreur absolue (les "beuuuuaaaa" du chanteur, des synthétiseurs impossibles qui viennent des années 80) et les grandes idées (les trompettes de l'apocalypse, les gros riffs sales).

Alors finalement, il nous reste quoi? Il reste Alice, qui est sûrement le morceau pour les gens qui n'aiment pas Sunn O)))))), le seul qui peut leur faire plaisir après 30 minutes de chevelus qui geignent. Déjà, ça a le mérite d'être instrumental, comme un éclair de lucidité. Et puis le morceau en lui-même est peut être celui qui justifie tout Sunn O))))))))), tout leurs albums chiants. Beaucoup plus vide et atmosphérique, on pourrait voir cette composition comme une longue traversée depuis les ténèbres jusqu'à la lumière céleste : ça commence par des guitares lointaines, douloureuses, qu'appuient des arrangements destructeurs mais beaucoup moins sombres qu'auparavant, et petit à petit, ça progresse, le drone se met en place, des sons apparaissent dans l'atmosphère pesante mais à la fois quasiment... épique. La progression est remarquablement conduite, les instruments à vent prennent une place de plus en plus grande, se mélangent, s'envolent, on a comme des frissons, et comme un dernier miracle, le morceau de s'achèver dans une douce clarté inattendue, baignée de harpes enchanteresses, des petites mandolines et d'improvisations au trombone, et c'est absolument magnifique. Alors forcement, quand, au sortir de ce morceau, on réécoute le reste de l'album, on est amer. Mais peu importe, ils peuvent retourner à leurs incantations post-pubères de metalleux, il reste Alice, la meilleure chose qu'ils ont jamais faite.

Ça donne donc un album auquel je donne presque la moyenne, mais surtout grâce à Alice, car, si on voulait être honnête, franchement, ça reste à 3/4 un bon gros gâchis de talent à cause d'une espèce de fascination complètement ringarde et quasiment hilarante pour un coté "druide" dont on aurait pu croire qu'ils auraient eu l'intelligence de se débarrasser. Jetez vos capes les mecs, vous avez plus l'age, y'a un moment où il faut grandir un peu. Dommage Sunn O)))))))))))))))))))))).

Emilien.

ps : je n'ai pas fait un seul copier/coller pour écrire l'insupportable nom du groupe. J'ai plus utilisé la touche ")" de mon clavier que jamais BON SANG.

[Tourne Disque] : Sunn O))) – Monoliths & Dimensions

Southern Lord
18 Mai 2009
4/5












Il est très dur de juger le drone métal de Sunn O))), et particulièrement Monoliths & Dimensions, qui sonne comme l’aboutissement de 10 ans de musique pour le duo, et bénéficie d’une reconnaissance médiatique plus accrue. Il y a deux façons d’appréhender cette brulante expérience, et surtout deux manières strictement opposées d’en être touché. Basée sur de longs drones métalliques, cette musique avant tout sensorielle contient de nombreux codes ésotériques. On peut en effet trouver risible ces cérémoniales doom de 10 à 20 minutes, mises en scènes comme des messes noires, et portées par des vocalises graves et machiavéliques. Mais si on creuse un peu plus, on y découvre des références bien plus profondes (un hommage à Miles Davis sur Agharta et à Alice Coltrane sur le chef d’oeuvre Alice) et un rayonnement plus spectral et majestueux que véritablement diabolique. Monoliths & Dimensions semble respecter l’essence lourde et primitive de l’univers de Sunn O))), tout en y élargissant largement son horizon avec la participation d’une section orchestrale (cors, harpe, flûte, piano, cuivres, cordes) et de chœurs féminins angéliques. Sûrement grâce à cette ouverture incroyable et à ce sens aigu des nuances et des textures (qui d’ailleurs redonne largement ses lettre de noblesses au doom métal), la musique de Sunn O))) atteint non pas des pics d’intensité mais une immersion passionnante dans un univers parallèle obscur.

François.

http://www.myspace.com/sunnofuneraldoom