dimanche 31 août 2008

[Tourne Disque] : The Dodos - Visiter

Label : Wichita
Sortie : 18 Mars 2008
4/5








Cette chronique est un erratum. Il faut effectivement l'avouer, nous sommes impardonnables. Par nous, j'entends l'équipe de ce blog. Sans le faire exprès, nous avons rendu votre été moins ensoleillé, moins joyeux, moins beau et pour une raison simple : nous avons oublié de vous conseiller d'écouter impérativement un album qui était pourtant la bande son idéale de cette saison, une musique qui colle à sa chaleur moite et son ennui déguisé en détente. Nous avons oublié de vous parler du deuxième album de The Dodos, duo américain que seul les plus paresseux qualifieront de groupe indie (oh le vilain terme) tant sa qualité vole plus haut que les autres choses affreuses qui sont sorti et qui sortiront cette année. Corrigeons donc le tir immédiatement avant que les feuilles mortes nous strangulent et que les larmes des nuages nous noient.

Ça commence par des arpèges lumineux, un banjo venu du ciel, une batterie qui semble taper du pied sur un plancher poussiéreux et une mélodie toute simple. Le tout distille une mélancolie sobre et sans pathos dans une ambiance folk des plus délicates. Puis soudain, ce morceau d'ouverture s'enchaîne sur un autre, et comme par magie, la batterie se lance comme une machine, les boites à musique rouillées frappent et l'on se retrouve ailleurs, et le simple groupe acoustique devient doucement psychédélique pour rejoindre délicatement une certaine frange de la musique américaine néo-hippie sans pour autant tomber dans leurs écarts - comprendre, en restant efficace. C'est entre ces deux aspects pas si éloignés que tout l'album Visiter semble se construire, allant de l'un à l'autre pour parfois les mêler et créer un ensemble à la fois riche et minimaliste. Le postulat de base du groupe est pourtant taillé pour l'intimité : d'un coté une guitare folk, magnifiquement jouée, alternativement martelée puis caressée tout en arpèges et finger picking. De l'autre, une batterie, métronomique et riche. Rien de plus, certains morceaux en témoignent comme le très beau Park Song. Mais, et c'est là tout le talent du duo, il ne s'est pas contenté de produire sur cet album de petites ballades tranquilles en permanence ; il a su insufflé une fougue étonnante dans sa musique qui, si elle n'est pas totalement de première main, offre quand même des morceaux brillants tel que Fools où, sur des rythmiques quasiment tribales, un chant sans accrocs aux "oh oh" salvateurs (et quelque peu canadiens, si vous voyez ce que je veux dire) semble valser miraculeusement dans l'air. Et pour enrichir le spectre sonore de l'ensemble, le groupe a ajouté avec discrétion quelques trompettes, quelques guitares électriques, quelques petits détails qui ne sont que des petites surprises, des petits plus autour d'un squelette dont on s'étonne qu'il soit aussi simple. En ces temps qui ont pardonnés un peu naïvement tout les excès électroniques passés pour les réutiliser sans génie ni gloire, The Dodos sort un album épuré mais pas vide, entièrement acoustique mais pas austère. Au contraire, c'est débranchés que les deux garçons acquièrent un souffle absent chez tant de groupes actuels.

Le groupe s'autorise à peu près tout sur cet album, et c'est ce qui fait sa force. Dans Joe's Waltz, on passe d'un morceau triste que n'aurait pas renié Elliott Smith à un ensemble quasiment blues rock, avec guitares martelés et gros accords. Mais entre ces deux passages, le groupe reste inchangé, aucun instrument ne s'est ajouté, le guitariste a juste frappé ses cordes plus fort et avec de la distortion, et le batteur a frappé ses toms avec vigueur. Mais vous n'y avez vu que du feu, le morceau vous a transporté et quand le silence se fait vous vous demandez si vous écoutez toujours la même chose. Une telle puissance avec juste des instruments acoustiques, on n'avait pas entendu ça depuis bien longtemps, trop longtemps. Sur le final de Paint The Rust, le groupe fait tout simplement du rock aux influences country, à grand coup de bottleneck alors que dans le morceau précèdent sonnait comme une chanson traditionnelle reprise avec de la trompette. Et même quand l'album semble se perdre dans des morceaux un peu moins convaincants à la fin, principalement à cause de leur longueur, le groupe lâche encore quelques perles comme le très beau God? de conclusion, grande montée enchantée, pour ne jamais laisser une mauvaise impression. Voilà pourquoi, au sortir d'une écoute de l'heure de musique que les Californiens nous propose, on ne peut être qu'enthousiasmé par la qualité implacable des compositions et la vision musicale à mi-chemin entre le passéisme et l'énergie juvénile que nous propose ce groupe qui, pour une fois, mérite tout le bien que la presse lui prête.

Il n'y a pas seulement des choses extrêmement prometteuses dans ces compositions pleines de vies. Il y a déjà et surtout des choses magnifiques, instantanément, qui nous donnent un album excellent qu'on peut sans mal considérer comme l'une des plus belles découvertes de l'année.

Emilien.

Un lien : www.myspace.com/thedodos
Extrait vidéo :
Le clip de Fools, relativement cheap mais la musique reste la chose la plus importante n'est ce pas?

mercredi 27 août 2008

[Tourne Disque] : Metronomy - Nights Out

Label : Because Music
Sortie : 8 Septembre 2008
3/5





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Qui a dit qu’il fallait automatiquement bouder les groupes fluos influencés par les années 80 ? Bon ok, je l’ai peut être sous entendu dans une de mes chroniques, et je dois avouer que je n’avais pas entièrement raison. Il existe bel et bien des exceptions tout à fait étonnantes, comme ce deuxième album de Metronomy. Nights Out est loin d’être une de ces arnaques plébiscitées par fluokids ou autres blogs branchés.

La musique du groupe affiche très vite les couleurs : des compositions electro/pop dansantes aux paroles tristes, une dynamique héritée du post punk, des sons de claviers acides très datés (rappelant les synthétiseurs robotiques de Kraftwerk), des guitares torturées (la meilleure surprise), et enfin quelques manies mainstream. C’est un peu l’album dance et hype qui fera parler les branchés, mais aussi l’album méticuleux et inventif dont les détails intéresseront les plus mélomanes.

Nights Intro est sûrement le morceau introductif le plus étrange et gonflé qu’on ait entendu sur un album de pop/dance en 2008 : un lourd et distordu son de trompettes retentit, vite rejoint par des notes théâtrales de guitare sèche et d’un ukulélé. Une marche funèbre et ralentie, pour précéder judicieusement l’éclatement des sons vifs et énergiques de l’instrumental The End Of You Too. Cette suite de textures incompatibles donne un effet de chaud/froid imprévisible. Après un début très réussi, on a affaire dans le cœur de l’album à un groupe systématiquement indécis, entre une radicalité réjouissante des formes au sein de tubes pop, et un manque d’inspiration (voire une paresse) dans certaines mélodies ou compositions.

Du côté de l’inattendu, les guitares aux notes stridentes surprennent. On les croirait tout droit sortis des disques de Père Ubu (My Heart Rate Rapid) ou dans une moindre mesure de Captain Beefheart (le début de Side 2). Puis l’immédiateté ainsi que l’ingéniosité de la structure de morceaux instrumentaux comme The End Of You Too et Back On The Motorway dynamitent l’album. Très vite, on préférera s’amuser et s’étonner des sons de claviers volontairement cheaps plutôt que de les critiquer avec un mauvais esprit snob, car le trio communique une vraie sincérité dans leur utilisation (une naïveté même). Les beats martiaux (évoquant des roulements de tambours) comme on entend rarement dans ce genre de disques (Nights Intro, A Thing For Me), apportent également de l’ampleur aux chansons. Un des morceaux les plus intéressants demeure Holiday : des déflagrations électriques de guitares amorcent un tube calibré pour la piste de danse (beat électro soutenu, basse disco et funky), sur lequel s’entremêlent des voix graves et aigues d'outre-tombe. Finalement les éléments les plus arty (les guitares dissonantes, les voix étranges, les saxophones free de Back On The Motorway) évitent toujours de faire paraitre le groupe comme trop prétentieux, puisque toujours insérés dans une dynamique cohérente. Pas toujours brillante, une partie de l’album pêche par des morceaux plus conventionnels et un peu poussifs avec un chant impersonnel, qui tendent par certains côtés vers une forme de formatage (Heartbreaker, On Dancefloors). La toute fin est désolante car Nights Outro termine l’album en conclusion conceptuelle un peu forcée qui n’a pas vraiment sa place.

Partagé entre le mainstream et l’indie, l’inégal Nights Out, album multiforme, a un gros potentiel commercial malgré son côté subversif. Et on ne va pas s'en plaindre.

François.

http://www.myspace.com/metronomy
Extraits vidéos de l'album:
Holiday

My Heart Rate Rapid

dimanche 24 août 2008

[Tourne Disque] : Coldplay - Viva la Vida or Death and All His Friends

Label : Parolophone
Sortie : 12 Juin 2008
2/5








Ah, dieu merci, dans le monde, en ce moment même, des milliers de fans de Coldplay respirent. Non, pas ceux qui sont des gens qui écoutent que ça et qui, de toute façon, aimeraient n'importe quoi fait par ce groupe parce que Chris Martin, il a trop une belle voix. Je parle de ceux qui n'assumaient pas leur amour pour Coldplay, ceux qui avaient bien aimé The Scientist mais qui n'avaient jamais osé l'avouer à leurs amis parce que merde, ils ont une image à tenir, ceux qui avaient même acheté X & Y mais qu'ils avaient planqués chez eux pour que personne ne tombe dessus, ceux qui avaient versés une larme en écoutant A Rush Of Blood To The Head, ces pauvres types là, coupés en deux avec ce combat entre le coeur et la raison, oui, et bien ils sont sauvés. Le voilà l'album de Coldplay qu'on peut assumer! Mais si, regardez, y'a des violons, preuve qu'il y a eu un travail sur les orchestrations et que c'est pas que du U2, sur Yes c'est même arabisant attention. Mais si, regardez, y'a Brian Eno qui a produit le truc, une légende vivante, preuve absolue que le groupe est devenu mature, et est même devenu un peu expérimental, forcement, on fait toujours des trucs bizarres quand on a Brian Eno avec soi. Et puis Chris Martin a écouté pendant des heures Arcade Fire (et a pompé le groupe avec un certain aplomb sur Lovers In Japan sans compter pleins d'autres petits détails qui parsèment l'album), sans oublier les traditionnels emprunts à Radiohead qui surnagent un peu plus que d'habitude sur un 42, ce qui fait que tout ça devient plus indé et moins stade donc plus facile à montrer. Bref tout le monde est content, c'est formidable, Coldplay est de retour.

Sauf que ce serait oublier que l'on écoute un album de Coldplay, le groupe de pop-rock radio-friendly et asseptisé qui remplit les stades de gens normaux et les oreilles de caresses molles, on écoute du Coldplay, le groupe déprimant le plus de bonne humeur, le groupe aventurier le plus prudent, le groupe épique le plus lent, le groupe larmoyant le plus sec, le groupe pour adolescents le plus adulte. Alors ça s'écoute, ne me faites pas dire ce que j'ai pas dit, 42 est même un bon morceau, cliché mais réussi, et malgré que tout l'album soit dramatiquement peu original, on a quand même un groupe qui fait son boulot tout à fait convenablement et qui réussira à convaincre tout le monde, ce qui n'est pas toujours facile à leur niveau. Mais à part ça, et en ce qui me concerne, rien de neuf sous le soleil, Viva La Vida est ni expérimental ni étonnant ni brillant ni raté, on a un groupe qui fait toujours les mêmes choses avec les mêmes recettes que ce soit les tics de voix mignons de Chris Martin, les pianos qui jouent des accords mineurs, les guitares noyées dans la reverb et les pochettes d'album les plus laides au monde. Pourquoi pas?

Emilien.

http://www.myspace.com/coldplay
Extrait vidéo de l'album:
Coldplay - 42

vendredi 15 août 2008

[Tourne Disque] : Zach Hill - Astrological Straits / Black Pus - Black Pus 4 : All Abord The Magic Pus







Zach Hill - Astrological Straits

Label : Ipecac
Sortie : 12 Aout 2008
2/5






Black Pus - Black Pus 4 : All Abord The Magic Pus

Label : Diarreah
Sortie : 7 Avril 2008
3,5/5


Dans un groupe, le membre le plus insupportable, c'est le batteur. C'est toujours le type qui ne connaît pas le nom des morceaux, qui a des goûts pas terribles, c'est un amas fou de problèmes divers quand il y a des concerts, il met des heures à se préparer et à installer ses machins, il joue trop fort ou alors trop doucement, il est trop discret ou alors veut amener l'attention sur lui, et une fois sur deux il est pas en rythme. Bref, ça va jamais et je parle d'expérience. La boite à rythme à été popularisée parce que les batteurs sont des emmerdeurs. Ainsi donc, quand sortent à la suite deux albums solos de deux batteurs parmi les plus surexcités au monde (avec Greg Saunier), on est en droit de craindre le pire, de cacher les enfants, de boucher ses oreilles avec de la colle, parce que des cinglés qui tapotent en roue libre avec un micro pour eux tout seul, c'est souvent terrifiant. Souvenez vous de Phil Collins.

D'un coté, nous avons Zach Hill, batteur de l'acclamé duo math-rock Hella, devenu récemment un quintette (et, dans le même temps, un groupe exaspérant lorgnant péniblement vers Mars Volta) qui nous propose un premier album qu'on qualifiera poliment de peu léger. Une règle assez simple résume le problème : tout album, autre que les premiers albums de Hella, qui comporte un membre de Hella est un album fatiguant. Autant dire que sur un album solo avec le guitariste de Hella qui participe (en plus d'autres musiciens qui en font eux aussi trop), il est important de préparer un peu d'aspirine. Aimant beaucoup le math-rock, ses mesures aux métriques biscornues et ses rythmes tellement alambiqués qu'on se croirait hors rythme et que secouer la tête dessus implique de s'abîmer les cervicales, Zach Hill est un type brillant, intelligent, extrêmement inventif. C'est peut être là le défaut flagrant d'Astrological Straits et de son heure de musique remplie ad nauseam de coups de baguettes et de notes : son coté premier de la classe, la sensation continue d'écouter une musique crâneuse, qui n'est compliquée que pour le plaisir de montrer à tout le monde qu'on arrive à jouer en 11/4 avec trente notes par secondes. Dans des morceaux comme Iambic Strays ou Hindsight Is Nowhere, les amas sonores bordéliques et trop complexes pour être honnêtes sont les cache-misères de mélodies pauvres et d'une incapacité totale de concision, ce qui donne des espèces de compositions vides mais trop riches, qui forment une bouillie sonore qui inspire un ennui total. Pire encore, durant l'onaniste Uhuru, Hill se lance dans un solo de batterie (quel manque de goût!) de plus de 3 minutes totalement plat et ennuyeux, exercice de style idiot et narcissique qui le place au même niveau que n'importe quel ignoble groupe de death metal. Et finalement, c'est quand il accepte enfin d'en faire moins au service de ce qui ressemble de près ou de loin à un morceau construit qu'il devient plus convainquant comme dans ce Dark Art brillant dont le refrain est une envolée époustouflante et jouissive, ou encore Stoic Logic et le morceau-titre de fin. Mais pour entendre ces quelques morceaux réussis, qui portent tout de même un peu sur l'estomac à la fin, il vous faudra supporter toute la musique diarrhéique qui l'entoure. Tout le monde n'est pas prêt à faire des sacrifices pareil.

Le problème est différent pour le quatrième album de Black Pus, projet solitaire et bizarre de Brian Chippendale, le batteur de Lightning Bolt qui est, rappelons le, l'un des meilleurs groupes de noise rock de la décennie. Après des premiers essais disponibles gratuitement sur internet, All Abord The Magic Pus (titre hilarant) est le premier a être distribué en cd et présente la facette la plus infâme de la musique de ce type tout en étant l'album le plus "accessible", si on peut dire, des quatre. Enregistré à la maison avec un matériel qui est, ahem, lo-fi, il n'y aura que les habitués du raffut qui pourront aller au bout des huit morceaux sans avoir envie de se tirer une balle ; pour les autres, passer le premier morceau sera déjà un exploit qu'un déplacement de cet album vers la corbeille récompensera fièrement . Et pourtant, c'est un tort, car la musique de Black Pus est vraiment autre chose, un monde à part entière qui mérite d'être exploré avec un soin accru. Sorte de résumé de toutes les obsessions de Chippendale qu'on entendait déjà fortement chez Lightning Bolt, Black Pus mélange très étrangement une batterie surpuissante (mais qui ne tape pas tout le temps, prend ça Zach Hill!), des synthés de jeux vidéos passés sous des tonnes de distorsion et d'effets venus des 80's avec des chants enfantins et répétitifs couplés à des mélodies pop, le tout massacré par une anti-production infernale et étouffante définitivement noise, pour l'amour simple de la violence sonique primale. Ce type aime les accords majeurs et le bruit qui fait siffler les tympans ; sa musique concilie les deux. Parfois, on entend beaucoup le premier aspect et ça donne des morceaux comme le génial Land of the Lost, qui tient en quatre accords, une mélodie imparable et un son proprement infâme, ou encore Body on the Tide, qui est presque émouvant, avec des "la la la" et des sifflements délicieusement décalés par rapport aux synthés bruyants qui semblent sorti d'un dessin animé avec des super héros qui combattent les forces du mal. A d'autres moments, c'est surtout bruyant et jouissif, la preuve avec ce The Wise Toad au riff minimaliste poussé par une rythmique atomique ou My House is a Mouse qui massacre une ligne de "basse" (jouée au synthé) géniale avec des claviers aigus et un chant plutôt aléatoire. L'album se révèle cependant un peu moins convainquant dans les morceaux un peu sans queue ni tête qui s'allongent inutilement comme ce Pagan 4 President dont les neuf minutes passent difficilement malgré des expérimentations pas forcement ratées à base de larsens prodigieux et un jeu de batterie toujours aussi excellent et brutal. Ce qui finalement entraîne deux réactions simples : le fait de se rendre compte du talent incroyable et de la vision musicale sans concession que construit, album après album, projets après projets Brian Chippendale, et aussi l'attente accrue d'un nouvel album de Lightning Bolt (le dernier datant de 2005 déjà) chose qui devrait, on l'espère, ne pas trop tarder, vu que le groupe refait une tournée qui passera en Europe (suivit entre temps d'un autre album de Black Pus prêt à sortir, ce qui sera donc le 5ème en 4 ans, en voilà un homme prolifique). Parce que, certes, Chippendale est très bon avec Black Pus, ce que prouve clairement ce nouvel album qui est recommandé à tout les amateurs de musiques extrêmes mais marrantes, de noise rock de qualité mais pas totalement imperméable, et à tout ceux qui veulent tout simplement écouter quelque chose de différent, oui, très bien, mais ces expérimentations brillantes ne peuvent être que les prémices d'un retour biblique de Lightning Bolt, groupe qui nous manque chaque jour un peu plus.

Parce que, en fin de compte, qu'ils soient épuisant ou complètement barrés dans des albums solos inégaux, les batteurs nous amènent tous vers la même conclusion qui est la raison d'être de la batterie : ne laissez pas un batteur tout seul, c'est mal. Parce qu'ils sont franchement meilleurs avec d'autres types. Et on s'en rend compte merveilleusement en faisant de la musique avec eux. Surtout quand, en répétition ou en concert, après avoir totalement oublié qu'il y a même un batteur pour se concentrer sur ce qu'on joue, on relève les yeux, on écoute l'ensemble, et on est frappé en se disant "fichtre, mais en fait, tout ça ne tient debout que grâce à la batterie, et c'est formidable grâce à la batterie". Là, on se dit que finalement, oui, ça justifie d'avoir à déplacer, en sueur, tout ses foutus toms qui pèsent des tonnes jusqu'au coffre de la voiture à la fin du concert.

Emilien.

liens :
pour Zack : http://www.blogger.com/www.myspace.com/zachhillmusic
pour Brian : http://www.blogger.com/www.myspace.com/theblackpus

Extraits vidéo pour les deux album :
Zach Hill et le clip, disons, minimaliste de Dark Art, le seul morceau à écouter de son album si il ne faut en écouter qu'un.


Brian Chippendale, lors d'une performance de Black Pus, jouant un morceau/jam inédit dans une cave, avec violence et amour.

dimanche 10 août 2008

[Tourne Disque] : CSS - Donkey

Label : Sub Pop
Sortie : 22/07/08
2,5/5








Oleum Perdidisti Cansei De Ser Sexy. C'est un véritable crève coeur que de se voir affliger le douloureux pensum de mettre une note médiocre à un groupe qui ne mérite pas ça, qui a fait de son mieux mais n'a pas réussi. Comme un ami qui échoue au bac quand on a réussi à l'avoir, on se sent gêné d'assister à la débâcle d'un groupe qu'on aime bien. Quel cruel dilemme qui s'exprime ici entre la pure objectivité qui met en exergue une vérité accablante, et un parti-pris peu professionnel qui donnerait à nos brésiliens le bon dieu sans concessions parce que, franchement, c'est presque nos copains.

Le premier album de CSS n'était pas génial. Franchement inégal, il semblait se chercher dans des genres mal digérés, le tout avec un coté débile un peu gênant, et une palette de sons electro ignobles par endroits. Mais il était trop charmant pour qu'on en dise du mal. Ne faites pas vos intellos, c'est de toute façon mieux vu d'aimer ce morceau que de cracher dessus : Let's Make Love And Listen To Death From Above était le truc à faire danser en 2006, et si vous avez fait l'effort d'écouter en entier leur premier essai, à coté de choses profondément ennuyeuses, vous étiez obligé de trouver un morceau à vous passer en boucle. On évoquait le rock indépendant américain des 90's, l'electro-pop de groupes comme Le Tigre, certains allait même jusqu'à penser à Blondie, mais l'idée principale était la même : CSS n'était pas encore un autre groupe qui fait un tube et disparaît, non, on attendait réellement quelque chose d'eux. Pas qu'ils nous sortent un Sgt Pepper, mais ce groupe était prometteur à sa maigre échelle de groupe de pop du nouveau siècle et on était presque un peu impatient de voir comment le groupe allait s'en sortir avec le toujours-très-difficile-deuxième-album. Il fallait faire attention, il ne fallait utiliser encore les mêmes recettes, il ne fallait pas refaire Let's Make Love, il ne fallait pas rester dans un entre-deux electro/rock qui ne pouvait passer que sur un premier album, il fallait rester toujours aussi efficace mais en enrichissant le son : il fallait pas faire exactement la même chose, sinon tout le monde aurait cracher dessus, mais recréer la même fraîcheur que celle du premier album. Le top du top aurait été de faire passer le groupe de petit plaisir parfois honteux à groupe installé qu'on est fier d'écouter à fond.

Autant dire que c'était impossible. Le voilà le handicap : ce groupe était voué à décevoir, forcement, parce que c'était leur deuxième album et que dans cette situation, on ne peut souvent rien faire face au poids d'un premier album qui a marché, sauf dans des cas exceptionnels. Oh, on espérait naïvement un miracle. Mais maintenant que nous sommes face à l'échec, on est presque gêné pour nous même d'avoir cru en CSS, comme si l'on se désengageait cruellement de la hype, attitude prévisible et lâche. Pourtant, le groupe a vraiment fait essayé, même une écoute superficielle de l'album le montre : le son est plus dense, on sent qu'il y a eu plus d'écriture qu'avant sans qu'ils aient besoin de le rabâcher en interview, le groupe ne reste pas sur deux pauvres accords et une batterie disco. S'inspirant beaucoup plus de groupes comme Metric ou les Breeders (ils reprennent Cannonball religieusement en face-b de leur premier single) sans pour autant suivre leurs constructions sophistiquées, ils approfondissent cet aspect rock déjà présent avec Off The Hook sur leur premier album, dans des morceaux comme Rat Is Dead (Rage) ou Left Behind. Dans Give Up, on se demanderait presque si les "Allright Now!" de Lovefoxx ne sont pas des hommages à ceux de Kim Gordon dans Washing Machine de Sonic Youth. Malheureusement, ce n'est pas convainquant du tout, les morceaux sont relativement plat, pas mauvais mais sans aucun veritable moment fort et tournent un peu en rond malgré quelques bons moments comme l'entêtant Jager Yoga d'introduction, Air Painter, ou le très mignon et 80's Beautiful Song. Même constat quand on écoute les quelques morceaux plus électroniques, pourtant plus étoffés qu'en 2006, comme le très crispant Let's Reggae All Night, incapable de décoller à un seul moment pendant 4 longues minutes qui vieillirons très mal si elles ont la chance de ne pas être oubliées. Et quand les deux se mélangent, les résultats sont encore plus désastreux comme ce How I Became Paranoid qui mêle effroyablement synthés europop et guitares déjà vues.

Condamné à être jugé à la lumière du premier album, malgré toute la bonne volonté du monde, Donkey est un album correct mais enterré d'avance, qui apporte du changement chez CSS mais en perdant dans le même temps, sans que cela soit lié, toute la fraîcheur et l'efficacité du groupe et cela à cause d'une chose toute simple : le temps. Le temps, qui connaît la réponse, à donné la solution malgré les efforts de CSS. On pourrait se demander si l'inverse ne se serait pas produit si Donkey était le premier album du groupe et que le premier était le deuxième. Peut être serais-je en ce moment même en train de dire que tout cela ne vaut pas la bonne époque de Donkey. Mais cela ne change rien au fait que désormais, CSS a perdu son état de grâce en essayant pourtant de bien faire, avec une honnêteté presque désarmante. Et finalement, c'est peut être le morceau Believe Achieve qui résume parfaitement ce deuxième album (dont on parlera peut être en disant que c'est le second album bientôt) : après une introduction ignoble qui sonne comme du mauvais Goldfrapp et des couplets poussifs et inutiles, on se retrouve avec un refrain immense qui est la plus belle chose jamais fait par le groupe, avec guitares acoustiques merveilleuses et piano délicat. Comprendre : entre deux hommages un peu ratés à des groupes meilleurs et des choses insipides et détestables, CSS retrouve parfois des éclairs de génie qui nous rappellent pourquoi on a aimé ce groupe et pourquoi on ne peut pas en dire réellement du mal. Parce qu'au fond, CSS est un bon groupe.

Les gens diront que ce n'est pas le cas, mais je sais que c'est vrai.

Emilien.

un lien : www.myspace.com/canseidesersexy
Lien vidéo de l'album :
Le clip un peu longuet de Left Behind :

dimanche 3 août 2008

[Tourne Disque] : No Age - Nouns

Label : Sub Pop
Sortie : 5 Mai 2008
2,5/5








Je n'ai rien à dire sur l'album de No Age. Enfin non, j'exagère, il ne me laisse pas indifférent, mais j'ai relativement peu de choses à dire dessus, il ne me laisse pas différent. Je n'ai pas envie d'en dire du bien ni du mal, je n'ai rien envie de dire de spécial, juste l'envie d'en parler, allez savoir. L'album de No Age n'a pas grand chose à dire non plus et il a été fait juste pour l'envie de faire de la musique. Si vous avez mieux à faire, n'écoutez pas l'album de No Age et ne lisez pas cette chronique. Encore faut il avoir mieux à faire. Cette chronique est le parfait miroir de l'album de No Age. Tout comme Nouns n'apporte rien ou alors des pacotilles à l'histoire de la musique ou à l'auditeur ou à la préoccupation très fin de siècle de savoir l'avenir de la musique rock, cette chronique ne vous en dira pas plus sur cet album que n'importe qui n'importe où a déjà pu vous dire. Cet album répond à mon vide pseudo-journalistique par son propre creux pseudo-noise-pop-rock et vice-versa. Et, en fin de compte, on oubliera les deux au profit de choses plus intéressantes, et c'est bien naturel.

Mais pour l'heure, il faut en parler, comme il a fallu à notre duo américain faire un album après avoir fait des eps. Je suis pas obligé. Ils étaient pas obligés non plus. Les chansons de No Age sont très simples, comme une phrase sujet verbe complément. Elles se ressemblent toutes un peu. Elles mêlent facilement des ambitions pop et des riffs gentiment intellectuels. Exemple, Here should be my home. C'est très efficace, ça a tout, le rythme, la suite d'accord, les petites notes, l'espèce de mélodie. Théoriquement, c'est impeccable, c'est très bon. Mais on a aucune envie particulière de la réécouter. Multipliez ce cas de figure quatorze fois et vous avez parlé de tout l'album. Album? Succession de chansons en vrac plutôt, autant que ceci est plus une succession de phrases qu'un travail argumenté. Preuve? Le tout se clôt par Brain Burner, morceau sympathique qui se finit de manière banale. Vous écoutez cet album en aléatoire, vous voyez pas la différence. Chaque morceau peut aller vers n'importe quel autre, l'effet sera exactement le même. Parfois, on s'attend à quelque chose, on s'attend à une révélation, le début est très très long et se poursuit pas mal de temps et s'allonge et se prolonge et l'introduction dure pendant plus de la moitié du morceau et puis finalement le refrain arrive et rien. C'est juste un refrain qui ressemble au précédent. Mais comme le précédent était pas mal, celui-ci est pas mal non plus. Ce n'est pas grave.

Je pourrais, par mimétisme, faire comme No Age, je pourrais, trop régulièrement, vous citer des artistes et répéter leurs noms dans un grand name-dropping bien vu. Sonic Youth, Beach Boys, Liars, My Bloody Valentine, Animal Collective. Genres. Punk, noise, pop, rock, expérimental. Blah blah blah. Ils sont tous la, on les entend et dans le même temps, on les entend pas, on entend No Age, on entend rien. L'album est homogène dans un sens : tout les morceaux se ressemblent. Ils sont pourtant différents. Au cours de l'album, No Age se met soudain à faire des choses un peu bizarre et expérimentales et frapadingues et on se dit que c'est drôlement original et paf dans un morceau y'a juste des voix sur du larsen et pfiou on se dit que ces types là sont sans concessions et FOUS sont oh la la super fort un peu comme moi qui ici me met à écrire n'importe quoi sans ponctuation. Des gens l'ont déjà fait? C'est la finalité qui compte, peu importe, le présent importe plus que le passé. Cet album n'est pas braqué sur l'avant. Ni sur l'après. Il est braqué nul part. Je suis sur que, dans le monde, personne ne parle de No Age comme moi tout comme je suis sur que, dans le monde, personne ne fait de la musique comme No Age. Mais pour quoi faire? Avant de parler de cet album, j'ai du l'écouter une bonne dizaine de fois. Je n'arrivais pas à me faire un avis dessus. Pas parce qu'il était trop compliqué ou demandait du temps. Non, parce qu'à chaque fois, je me souvenais même plus de ce que j'avais écouté. Ça me semblait pas mal mais ça me marquait pas du tout. Ça ne provoquait aucune réaction, ça ne mettait en jeu aucun sentiment. C'est toujours pareil aujourd'hui, mais maintenant, j'ai l'impression de le connaître un peu par coeur. Tout en ayant toujours aucun avis dessus. C'est une sensation tranquillement terrifiante. Alors j'en parle pour plus avoir à l'écouter, pour figer mon avis même si il est inexistant et j'ai mis la moyenne pour qu'il me laisse tranquille.

Voilà, c'est fait et c'est tout. J'ai dis à peu près ce que j'avais à dire. J'ai beaucoup parlé de moi et je suis tombé dans la facilité, mais l'album de No Age parle aussi beaucoup de lui et se regarde un peu jouer des choses clichées. Et finalement, que ce soit après avoir écouté Nouns ou après avoir lu cette chronique, le même constat tombe, désolant et bête : il ne vous en reste rien et vous avez juste occupé un peu de votre temps. Mais nous, No Age et moi, sommes content que vous l'ayez fait avec nos machins. Nous sommes en mai 2008, nous sommes en août 2008. Il ne se passe rien de spécial.

Emilien.

lien : www.myspace.com/nonoage
Extrait vidéo de l'album :
Le clip de Eraser, si vous n'avez rien de mieux à regarder :