samedi 27 juin 2009

[Tourne Disque] : The Mars Volta - Octahedron

Warner Bros/Mercury
23 Juin 2009
2/5












Après un disque bourré d’énergies violentes et de lignes tendues jusqu’aux cassures imprévisibles (The Bedlam In Goliath), les Mars Volta décident pour Octahedron de prendre une direction plus accessible avec un album plus aéré. L’intention est louable, ils essaient de se réinventer. Seul problème : ce qu’on aime justement chez les texans (et ce qui les rend si particuliers) est leur foutoir, non sens, excès et transe de la vitesse. L’album est donc rempli à moitié de ballades et à moitié de morceaux plus électriques. Sans tomber dans la médiocrité, le groupe déçoit dans les deux cas. On comprend vite que la notion de chanson dépouillée n’est pas compatible avec Mars Volta. En voulant composer des morceaux plus lisibles, ils tombent dans des travers pénibles, parfois proche du prog FM. Le chanteur Cedrix Bixler-Zavala est trop souvent en roue libre, avec ce chant de néo punk levant vaillamment le poing au ciel sur les morceaux rock, ou de diva soul trop lisse sur les ballades. Au niveau instrumental, Omar Rodriguez déçoit aussi, abusant de la reverb pour remplir l’espace sonore. Au lieu des arpèges infernaux auxquels il nous avait habitué, les guitares pachydermiques prennent place, évoquant plus At The Drive In que King Crimson. On a aussi perdu le souffle free de leur big band : les innombrables instants expérimentaux et inventifs qui regorgeaient dans les précédents albums se comptent maintenant en une poignée de minutes, comme emprisonnés dans les structures désormais classiques des chansons. Seule la gracieuse et voluptueuse Twilitht As My Guide s’en sort entièrement avec les honneurs (vocalises délicates, nappes floydiennes), contrairement à la mièvre Copernicus (avec en guise de fermeture des clipotis électro se déposant comme un cheveu sur la soupe). La demi-mesure ne semble donc définitivement pas leur correspondre, et il ne reste plus qu’à espérer qu’Octahedron soit un disque de transition. Il suffit par contre d’aller voir du côté de Cryptomnesia pour avoir sa dose annuel de Mars Volta bouillonnants, grâce à l’impulsion de Zach Hill.

François.

http://www.myspace.com/themarsvolta

lundi 8 juin 2009

[Bonus Tracks] : Grizzly Bear, Phoenix, Sonic Youth, The Horrors, Passion Pit

Grizzly Bear – Veckatimest
Warp
26 Mai 2009
4,5/5



Avec Veckatimest, le chouchou de Pitchfork s’impose comme un groupe au moins aussi solide que Radiohead. Grizzly Bear impressionne par la clarté de l’ensemble, de la pop de chambre lumineuse rêvant de grands espaces, en prenant à contrepied l’héritage de la musique folk sans la malmener, mais en proposant de nouvelles grilles de composition. Il est d’abord fascinant de voir à quel point le travail en studio est méticuleux, proche de l’orfèvrerie : de la composition, au mixage (3 longs mois), en passant par les arrangements, les quatre membres du groupe passent beaucoup de temps à façonner leurs chansons. Cette production admirable repose surtout sur une grande qualité d’écriture avec des structures imprévisibles, une utilisation inhabituelle (presque expérimentale) des instruments acoustiques, et des vocalises majestueuses et profondes. La lenteur générale des tempos en fait un album passionnant à explorer, car les instants de grâce ne se dévoilent pas instantanément. Chaque morceau contient des mini feux d’artifices (instrumentaux ou vocaux) qui viennent apporter des nuances d’une finesse rare. En témoigne Live With You, composé par Daniel Rossen, l’un des deux chanteurs principaux du groupe. Il illustre musicalement la notion de l’effort récompensée, avec une voix fatiguée qui s’effondre pour mieux s’élancer aussitôt sans que l’on s’y attende. A mille lieux des modes, Grizzly Bear livre, sans prétention mais non sans ambition, quelque chose de grand.




Phoenix – Wolfgang Amadeus Phoenix
V2 Records
25 Mai 2009
2/5



Le groupe qui incarne le mieux le romantisme de la French Touch avec Air, tend de plus en plus depuis It’s Never Been Like That (2006) vers une pop rock plus spontanée et sans artifices (pour ne pas dire conventionnelle). Derrière la trompeuse ambition démesurée signifiée par le titre de l’album, la musique de Phoenix est en fait très modeste, de l’indie rock très anglosaxon aux guitares vintages avec les touches électro en vogue. L’album typiquement cool à mettre en soirée, ennuyeux à écouter chez soi. On les a connus plus inspiré au niveau des mélodies (Alphabetical, 2004), car à part la magique Lisztomania, rien n’est très brillant, ni vraiment anecdotique. C’est le problème de ce disque un peu tiède. On peut louer leur tentative de voyage rétro futuriste de 8 minutes (Love Like a Sunset), malheureusement à côté de la plaque.




Sonic Youth – The Eternal
Matador Records
9 Juin 2009

3,5/5


Sonic Youth restera toujours un modèle d’intégrité dans la musique rock. Depuis leurs débuts au sein du courant no wave, leur vision du noise rock n’a jamais faiblit. C’est bien simple, depuis 1983, avec un rythme de publication d’en moyenne un album tous les deux ans, la qualité de leur musique oscille du chef d’œuvre radical (Confusion is Sex, Daydream Nation, Washing Machine, NYC Ghost and Flowers) au (très) bon disque de rock plus classique, aux fondations toujours solides. The Eternal ne constitue pas un changement majeur de direction pour le groupe, mais plutôt une évolution dans les nuances, avec un son de guitare plus rêche que sur les 3 précédents albums, et de notables nouveautés (les harmonies élévatrices de Leaky Lifeboat, la litanie rock de Massage the History). Malgré tout, au bout de 28 ans de carrière, ils restent les maitres du genre, loin devant toute la fatiguante vague shitgaze et revival shoegaze (Japandroids, Wavves, Pains of Being Pure at Heart etc, lire cet article pour en savoir plus).




The Horrors – Primary Colors
XL Recordings
21 Avril 2009
2,5/5


Si Primary Colors n’est rien de plus qu’un disque de rock passable et efficace qui n’apporte rien de vraiment neuf dans le genre post-cold wave (à côté de Poni Hoax, Editors ou Interpol), l’album vaut surtout pour son puissant et dernier titre: Sea Within a Sea. En 8 minutes, ils font rencontrer le style noir et glacial de Joy Division avec la transe Kraut de Can en concluant par de majestueuses boucles synthétiques évoquant le Portishead de Third (Geoff Barrow, producteur du disque, n’y est sûrement pas pour rien dans cette réussite). Ce n’est pas non plus révolutionnaire, mais ce melting pot moderne surprend agréablement à côté du contenu dispensable et déjà-entendu du reste de l’album.




Passion Pit – Manners
Columbia/Frenchkiss Records
18 Mai 2009
1/5


En un sens, Manners est un document complet et révélateur des pires tendances de l’indie pop de ces dernières années, où tics et maniérismes fluos sont condensés avec amplification. Pas vraiment des suiveurs dénués de talent comme les pathétiques Empire Of The Sun, les Passion Pit peuvent plutôt être vus comme le chainon manquant entre les Klaxons et MGMT. Il n’est pas question de cracher sur cette mode par pur principe, car des artistes comme Animal Collective (sur Merriweather Post Pavilion) ou Dan Deacon sont là pour représenter la face brillante de cette tendance (électro fluo, harmonies pop emphatiques, effets surchargés), grâce à de vraies bonnes idées de composition et une démarche de recherche qui consiste à se tourner vers l’avant plutôt que vers les années 80. En plus d'être trop criarde, le côté décomplexé de Passion Pit n'excuse rien.



François.